Il y a quelques jours, je vous ai promis une histoire. Elle avait lieu aux marquises. Elle racontait un changement de vie.
Mais voilà parfois la réalité rattrape la fiction et aujourd’hui, je vais vous raconter une histoire bien moins glamour, nul besoin de parcourir des milliers de kilomètres pour que la vie nous en inspire le triste récit.
J’habite un petit village à côté d’Antony, un village banal, un village comme un autre peut-être même un peu plus calme que la plupart des villes alentour, un village où ,bon an mal an, il fait bon vivre, pour une grande majorité de la population sauf …
Ces derniers jours, le froid a sévi, la neige, du verglas, des températures très basses sont entrées dans nos quotidiens. Nous râlons, montons un peu le chauffage, sortons les pull-overs et les manteaux bien chauds et continuons à vivre.
Mais dans ce petit village du sud de Paris, il y a, tout près des pistes d’Orly, une cinquantaine de personnes dont de nombreux enfants, qui vivent à longueur d’année dans des caravanes.
Depuis quelques jours, les fils électriques qui courent sur le terrain, brulent les uns après les autres étant incapable de fournir assez d’énergie pour chauffer toutes les caravanes.
Depuis quelques jours, les arrivées d’eau non protégées contre le froid, gèlent les unes après les autres, empêchant de pouvoir laver le linge.
La suite de l’histoire pourrait être : une belle solidarité de village, l’envoi de vêtements chauds, le don de vivres pourquoi pas, une intervention des pouvoirs publics afin que ces personnes puissent se chauffer correctement.
Mais il n’en est rien.
Ces gens sont des gens du « voyage », bien qu’ils soient sédentaires depuis des dizaines d’années, bien qu’ils séjournent sur la commune depuis des dizaines d’années, de génération en génération, ils sont devenus au fil du temps des parias. Et si la population, la mairie, les services sociaux les regardent d’un œil plein de méfiance, il y a ,en tout état de cause, de bonnes raisons.
Tous les bien-pensants, tous les bons Français travailleurs, tous les gens bien intentionnés à qui j’en parle ne tiennent tous à peu près le même discours :
Ils ne veulent pas s’en sortir, il n’y a aucune volonté de travailler et de sortir de cette ornière
Ils volent, ils boivent, ils ont trop d’enfants, ils vivent aux crochets du système, ils ne tiennent pas à être intégrés, ils sont assistés, etc., vous vous doutez que la liste des discriminations est très longue.
Et tous ces griefs futiles ou non sont le strict reflet de la vérité bien qu’émanant de jugements péremptoires.
Aussi, lorsque l’assistante sociale, râle pour donner des bons de gaz ou de vivres par ces grands froids et alors qu’elle m’expose de bonnes raisons pour ne pas faire diligence à la minute près, alors qu’elle me demande : « qu’en pensez-vous Mme Cassou ? Ai-je tort ? » ; Que lui répondre ?
La seule chose qui est aujourd’hui une réalité tangible :
50 personnes dans une misère noire,
50 personnes livrées au froid,
50 personnes démunies, perdues, sans ressources,
17 enfants subissant quoi qu’il arrive la mauvaise réputation de leurs parents.
Ces personnes sont cloîtrées dans leur caravane, commencent à avoir peur pour les enfants.
Certains d’entre eux sont malades et passent leurs journées emmitouflées dans des couvertures.
Leur moral est au plus bas, une d’entre elles m’a dit : « nous vivons comme des chiens, nous ne sommes pas des chiens ! ».
Je ne souhaite porter de jugement contre personne dans cette histoire.
Ces gens du voyage ne sont pas des saints, nombre de fois, ils ont été pris la main dans le sac ici ou là dans la commune, beaucoup d’entre eux ne travaillent pas et se nourrissent de rapines et aides sociales.
Pourtant, lorsque la situation devient aussi tendue et dramatique, devons-nous leur tourner le dos sous prétexte qu’ils ne sont pas politiquement corrects ?
Non, vous n’êtes pas des chiens ...