Le propre de la déprime est de surprendre par la vivacité inattendue des états d’âme. Depuis quelques jours, je me sens bien. Je ne suis ni angoissée en permanence, ni euphorique. Je baigne dans une paix intérieure, pas un nirvana planant à la 68, mais simplement du bien être, je suis en accord avec moi y compris mes travers, je suis en accord avec l’autre, y compris ses travers. Je n’éprouve pas de « peace and love », j’ai juste l’impression d’être moi, d’avoir une place d’où je peux voir, entendre, sentir. J’ai aujourd’hui clairement la sensation qu’écrire le mot bonheur en lettres majuscules est certes rare et délicieux, loin de moi l’idée que je ne puisse plus le faire, mais il serait vain de croire que le GRAND bonheur est une quête raisonnable, louable, épanouissante. Ce matin, je me suis levée, j’ai enfilé un pantalon en velours bleu, un pull léger vert olive, des ballerines noires, une écharpe blanche. J’ai vécu ma séance de yoga avec une intensité sans pareil. Mon corps et mon esprit en harmonie sont ressortis apaisés. Je ferai bientôt, des articles sur ce ressenti extraordinaire durant cette heure d’écoute de soi. J’ai mangé un sachet, un grand bol tout chaud de soupe pleine de « vert ». J’ai flâné dans "vista" un moment. J'ai écrit un article sans grande conviction, plus occupée par la forme que le fond, veuillez m'en excuser. J’ai repris une douche et suis sortie voir des amis. Le diner a été convivial et simple (heu, pas si simple d’ailleurs parce que l’onglet de veau, c’est rare et délicieux !). Je viens de rentrer et en attendant mon amoureux, j’écris. Cette journée qui n'est qu'à son crépuscule est passée comme l’éclair et pourtant j’en ai savouré chaque instant. Quand je précise aux gens que je ne travaille plus depuis plus de deux ans, cela semble paraitre terriblement incongru et tous s’inquiètent et me demandent sidérés ce que je peux bien faire de mes journées. Et bien, voilà, je vous rassure, il y a des milliers de choses pleines de simplicité voire de banalité qui, alors, reprennent leur attrait. L’inactivité ne fait pas partie de ma vie sauf quand je l’ai voulue. Je suis bien sur consciente du luxe que cette maladie me confère aujourd’hui, celui d’avoir des contraintes limitées; celui de n'avoir comme travail que celui que je fais sur moi ! Tous les mardis, je passe cinq minutes dans un café, avant l’entrevue avec la psy. La jeune femme derrière le bar m’offre chaque mardi, ce sourire qui de part son authenticité, sa gratuité est le plus beau cadeau du monde. Elle m’amène mon café en me disant « sans sucre? Je crois ». Et là à cet instant, je ne suis plus une étiquette sur un bout de papier, je ne suis plus un numéro de sécu ou de compte bancaire, je ne suis plus la référence d’un dossier, je ne suis plus la cliente à qui on pompe le fric, l’électeur à qui on bourre le crâne, je ne suis plus cette femme pressée qui court sans regarder, je suis MOI, un être humain fait de chair et de sang qu’un autre a reconnu et salue. C’est bien peu de choses me direz vous, j’en conviens et pourtant n’est pas tout le sel de la vie ? Si je peux me permettre un conseil, la prochaine fois que vous recevrez et vous donnerez ce sourire à quelqu’un, accordez vous le loisir d’y mettre un petit bout de votre cœur, accordez vous le temps d’y voir tout l’humanisme sans artifice, sans fard contenu dans cette attitude l’espace de quelques secondes. Accordez vous le temps de penser : « je suis heureux »… Moi, ce soir, je suis heureuse et je sais trop ce qu’est la mélancolie pour rester sourde au bonheur. J’ai si souvent emmerdé mes proches en hurlant et pleurant mon mal être. Alors, ce soir, c’est un sourire reconnaissant et apaisé que je leur offre. L'important ne réside pas dans le fait que ce bonheur soit encore là demain, mais dans l'intensité, la lumière, la douceur qu'il me procure, là, maintenant. je vais rejoindre ce cher Morphée (le fils de ...patati patata...lol) l'esprit, le cœur et l'âme sereine. Que votre nuit soit douce ... ...